Les excursions oniriques de Robert Combas à la Galerie Laurent Strouk
Plus que quelques jours pour découvrir « Plein la tête », où l’on peut découvrir les dernières œuvres de l’artiste sétois, à la créativité décidément débridée.
lnitiateur du mouvement baptisé « Figuration Libre » en 1981, Robert Combas est considéré comme l’un des artistes français contemporains les plus importants depuis les années 1980. Il est le seul à apparaître chaque année dans le classement Artprice des 500 artistes contemporains les plus cotés au monde. Une grande rétrospective lui a été consacrée en 2012 au Musée d’art contemporain de Lyon et en 2016 au Grimaldi Forum de Monaco.
Nourrie de rock, de BD, de science-fiction, son œuvre fait surtout référence à l’art brut et à l’imagerie africaine. Le style coloré et graphique est aussi inspiré des dessins d’enfants ou de la culture des banlieues. D’où son côté très urbain, qui le rapproche de street artistes tel Bault.
Représenté par la galerie Laurent Strouk, Robert Combas expose une trentaine de toiles grand format (peinture et encre acryliques, aquarelle) créées post confinement. Prolifique, l’artiste pose sur le monde un regard libre. Si le style est affirmé, il continue de chercher. Tous azimuts.
Plein les yeux
Foisonnante, l’œuvre colorée contraste avec les murs immaculés de cette très belle galerie située dans les quartiers chics de la capitale. Chaque toile est bien remplie et ses couleurs sont chaudes et vitaminées, rehaussées de noir. L’intégration du fond et de la figure, l’enchevêtrement des formes – et même de mots ou de chiffres – portent à son comble une manière de syncrétisme pictural. C’est un artiste rabelaisien ! Et quand il peint des ciels, on les repère davantage grâce à ses titres : Bleu du ciel, Un ciel jaune à pisser de joie, Le ciel fait risette…
En effet, ses titres sont mystérieux, épiques, tous poétiques : Tête de chef de quelque chose, Monstre sorti de moi par les encres magiques et la forme olympique… Il raconte qu’au départ, comme il était « complexé » de vendre ses tableaux, il a imaginé des titres « comme un cadeau BONUX » : « Je venais des Beaux Arts où les générations avant moi, Support surface & Co, avaient la religion du « SANS TITRE ».
Absurde et fantasmagorique
Aucun doute, nous sommes vraiment aux antipodes de l’art conceptuel. Robert Combas semble procéder par hybridation ou contamination. Heureusement, la pandémie ne semble pas avoir perturbé son quotidien, rythmé par une activité intense. Ses toiles reflètent toujours une association d’idées, un souvenir, une tranche de vie, un bout de jardin. Ses pins se transforment alors en cerf, avant de se colorer en bleu. L’artiste fonctionne un peu dans un esprit dadaïste, avec notamment l’écriture automatique. Son sens de la satire ou du grotesque le rapproche aussi de l’art naïf.
Il est sans censure, Robert Combas. Les corps s’imbriquent, plus qu’ils ne s’enlacent. Mais son expressivité est moins dénuée de lubricité qu’à l’ordinaire. Si les portraits dominent, on trouve aussi des natures mortes ou des scènes de genre. Chats, arbres, plantes, créatures fantasmagoriques et autres chimères peuplent ses toiles.
Profane et sacré
Sophistiquées, ces compositions sont riches de références artistiques qu’il revendique d’ailleurs fièrement « sans se la péter » : art brut, Tapiès, Miró… (Et tu kiffes une têt’ de mort, mais moi mon dodo c’est Miró que je KIF avec plein d’yeux et toute l’argenterie). Pourtant, Robert Combas est un alchimiste.
La guerre est très présente avec des combattants, des boucliers, des armes qui prolifèrent. Toutefois, ce sont ses masques et créatures à grosse tête qui marquent le plus les esprits. Avec ces chefs à plumes, totems et autres étrangetés, les couleurs vibrent et les symboles abondent.
Déchiffrer ces rébus est d’ailleurs très ludique. Et tous ces yeux qui nous regardent ! Quand on sait que ce sont les miroirs de l’âme, et que l’artiste avoue représenter les siens, on plonge alors volontiers dans son univers non dénué de malice.
Des yeux ouverts sur le monde, car son œuvre est malgré tout imprégnée de l’actualité. On trouve même Jean Castex en costume de gala qui vient d’être nommé 1er sinistre ! Et tous ces masques – même s’ils sont plus beaux que ceux nous protégeant de la pandémie – sont révélateurs de nos faiblesses humaines.
Sarah Meneghello
En savoir plus sur le très beau catalogue ici.
Site de l’artiste ici.
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